Par Hélène Pedneault
Je suis une québécoise, qui après avoir travaillé une dizaine d’années à l’étranger, en est à son quatrième mandat de coopération internationale dont deux en Haïti et deux au Sénégal. Mon intérêt pour la coopération ne date pas d’hier et la vie m’a permis de concrétiser ce rêve de participer à la mesure de mes connaissances à l’amélioration, si petite soit-elle de la vie de gens qui n’ont pas eu la même chance que moi de naître au Canada. Étant actuellement agente de liaison pour les volontaires et les partenaires au Sénégal, je suis appelée à me déplacer sur le terrain pour les rencontrer. Voici un résumé succinct d’une journée qui m’a particulièrement émue!
Village de Darou Rachmane, Femmes et la terre = Créations
J’aimerais vous partager ces moments que j’ai vécus lors de ma visite terrain tout dernièrement; la première eu lieu dans un village typique qui s’appelle Darou Rachmane et l’autre dans une ville du nom de Kaolack. Cette mission m’a permis de voir ce que j’ai rarement vu au Québec ou dirais-je même dans d’autres pays que j’ai visité ou habité.
La première visite effectuée consistait à voir les résultats d’un projet mené par un groupe QSF (Québec sans frontières – jeunes québécois de 18 à 28 ans). Ce projet vise l’autonomisation des femmes d’un village grâce à l’agriculture. Village tout de même isolé, sans eau courante, sans électricité et évidemment sans wifi mais avec un groupe de femmes démontrant tant d’intérêt à améliorer non seulement leur alimentation par la création de champs mais également à approfondir leurs connaissances. Cet intérêt pour l’activité a par le fait même amélioré l’aspect de socialisation des participantes. Il ne faut pas oublier que ces dames, sur qui reposent toutes les tâches ménagères et j’en passe, n’avaient pas beaucoup l’opportunité de se rencontrer et de travailler ensemble dans un but commun.
Vous auriez dû voir leurs sourires lorsque l’on a visité leur espace maraîcher! Ces femmes qui ont pris à cœur de venir très tôt s’occuper de leurs semences tous les matins, d’arroser à partir d’un puit si profond que les efforts sont titanesques et de revenir en fin de journée pour arroser à nouveau. Quelle fierté que l’on a pu déceler sur leurs visages lorsqu’elles réalisent que leurs efforts ne sont pas en vain !
La coopération internationale permet ainsi à ces femmes, qui sont tellement résilientes, de réaliser que leur effort communautaire crée des possibilités qui ne s’évaluent pas seulement financièrement mais beaucoup aussi en partages sociaux et humains.
AVEC à Kaolack – Sororité et Solidarité
Cette deuxième visite a eu lieu dans une AVEC (Association Villageoise d’Épargne et de Crédit) localisée à Kaolack. Ces associations sont nées de manière naturelle au Sénégal. Généralement un groupe de 30 femmes se regroupent et cotisent hebdomadairement selon le montant qu’elles ont choisi de façon démocratique et elles se partagent le tout sur une base annuelle ou selon les événements. Mais bien plus que cela, ces épargnes misent en commun créent un mouvement social de solidarité. Quelle belle surprise de me retrouver avec une trentaine de femmes dans le salon d’une des membres !
Elles étaient toutes vêtues de jolies robes identiques, ce qui reflète l’esprit de camaraderie mais surtout de sororité. Assises l’une contre l’autre sur les nattes, jeunes et plus âgées se les partageant en tout bienveillance. Cette proximité entre femmes qui malheureusement a été remplacée chez nous par un esprit de compétition m’a beaucoup impressionnée.
Durant cette rencontre de près d’une heure, elles ont partagé avec nous leurs besoins mais surtout ce que leur participation à ce regroupement a pu leur apporter. Ces apports ont eu des répercussions tant au niveau d’une amélioration de leur qualité de vie financière et familiale mais également au niveau personnel.
J’y ai vécu un moment dont je me souviendrai longtemps et qui me permit d’apprécier encore plus ces femmes africaines pour qui déjà, j’avais beaucoup de respect. Leur enthousiasme exprimé en Wolof et même en chant était également alimenté par des regards qui en disaient long sur ce qu’elles vivent grâce à cette association.
Pour l’une, cela a permis d’acheter un frigo pour sa petite entreprise de restauration. Pour l’autre c’est le regard de fierté de l’époux et des enfants face à cette autonomie qu’elle acquiert. Et une autre a partagé avec nous le fait que c’était la première fois de sa vie qu’elle avait son propre argent… C’est peu dire, ce que ces femmes ont mis sur pied. Leur volonté et leur engouement m’ont réellement touchée! Et encore là, à ma grande surprise, elles m’ont offert du tissu aux couleurs de leurs tenues… Cette fameuse Teranga sénégalaise, ce n’est pas seulement un mot… mais bien un fait !
Par le biais du développement international, j’ai vu et côtoyé des femmes battantes qui sont proactives et qui ne désirent qu’améliorer leur vie familiale, personnelle mais aussi communautaire. Il est nécessaire que leurs paroles soient non pas seulement entendues mais bien écoutées et que la place qui leur revient dans une société si jeune, leur soit attribuée !
Je ne suis ici au Sénégal que depuis peu, mais ces « sœurs » sénégalaises ont eu un impact auquel je ne m’attendais pas et je ne peux que leur souhaiter la concrétisation de tous leurs projets et leurs réalisations personnelles. Merci cher Sénégal pour cette expérience que je n’oublierai pas !